jeudi 19 juin 2008

Pour une Europe Fédérale

Je l’ai déjà écrit à plusieurs reprises, l’échelle de l’Europe sera celle où on pourra développer les politiques pour l’avenir. Croit-on pouvoir mener une politique sociale ambitieuse à l’échelle nationale dans le contexte de la mondialisation ? Pourra-t-on répondre aux catastrophes écologiques en cours sans une cohérence européenne ? Ne doit-on pas faire émerger une diplomatie européenne forte quand l’hégémonie des Etats-Unis est de plus en plus contestée ? Il faut une Europe intégrée, bien plus intégrée. Pour être plus puissante et plus cohérente. Ces questions étant fondamentales, les réponses doivent être démocratiques. Prenons l’exemple du domaine social. La concurrence fiscale et sociale entre les pays de l’Union Européenne est destructrice, tirant chaque pays vers le bas. Pour lutter contre, il faudra construire un modèle social européen unifié. Dans un débat qui ne pourra être que démocratique. Une Europe puissante, cohérente et démocratique ne saurait être autrement que fédérale.

Quelle serait la forme d’une Europe fédérale ? Pour la cohérence et la démocratie il faut un organe qui soit strictement européen, non une émanation des Etats, et démocratique. C’est au Parlement Européen de jouer ce rôle. Le Parlement Européen doit être fort, c’est-à-dire être le législateur principal en même temps que le contrôleur de l’action exécutive. Un vrai parlement quoi. Il doit être démocratique et européen : élu au suffrage universel direct, à la proportionnelle, sur des listes européennes. Avec de tels pouvoirs et un tel mode d’élection, les différents partis nationaux devront se regrouper dans de réels partis européens, cohérents, dotés de programme vraiment politiques et permettront qu’il y ait un débat sur la direction de l’Europe. Pas comme aujourd’hui.

Il ne s’agit pas non plus de faire disparaître les Etats. Ils peuvent garder une large autonomie. Qui peut nier par exemple que les différents Etats des Etats-Unis d’Amérique ont une large autonomie ? On peut ainsi imaginer un Sénat regroupant des élus au suffrage direct mais dans les cadres nationaux. On aurait ainsi une assemblée représentant les Etats à côté d’une assemblée représentant le Peuple. Chacun garderait à côté ses institutions nationales dont il faudra définir précisément les rapports avec les institutions fédérales.

Quoiqu’il en soit, les institutions européennes doivent émaner du peuple. Car c’est le peuple qui est le souverain naturel, c’est lui le pouvoir constituant. Peut-on accepter que des traités ayant un caractère constitutionnel, ils organisent les institutions, soient conçus et adoptés sans recourir directement au peuple ? Prenons le traité de Lisbonne : négocié par des représentants élus pour exercer la fonction exécutive et voté par d’autres représentants élus pour exercer la fonction législative. Personne dans cette affaire n’a reçu un mandat constituant de son peuple. Pour refonder des institutions de cette importance le principe démocratique exigerait une toute autre formule : une Assemblée Constituante Européenne, élue au suffrage universel direct dans un scrutin de liste européen, présentant un projet au peuple, celui-ci l’acceptant ou non dans un unique référendum européen. Convoquer une telle assemblée serait déjà un événement de type fédéral : ce serait concevoir l’Europe comme un tout uni et cohérent et plus comme une somme d’Etat.

Enfin, le traité de Lisbonne n’est à mon goût ni bon ni mauvais. Il ne changera, si on outrepasse le vote irlandais, rien de fondamental. De même, si on en reste au traité de Nice, l’Union Européenne continuera à voguer au rythme des négociations étatiques pour s’arracher un bout de quota. Il manque d’ambition, de vision. On se plaint que l’Europe ne plaise plus aux peuples. Ou que ceux-ci votent sans comprendre le traité qu’on leur soumet. Et bien, proposons un texte institutionnel simple et ambitieux qui saura faire valoir une vision et une volonté exaltante de l’avenir européen. Et on verra si le vote est mauvais !

Bref, c'est seulement en construisant une Europe politique, et donc fédérale, qu'on pourra en faire quelque chose, débattre, avancer.


Colin

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