L'un des avantages d'être sympathisant PS et non un authentique militant encarté, c'est qu'on peut lancer des idées allègrement, avec une naïveté parfaite, sans peur que ses camarades de section se moquent de vous parce que vous n'aviez rien compris à tel ou tel discours à Epinay. En somme, voici quelques considérations qui me semblent importantes et qui ne semblent pas recevoir beaucoup d'attention de la part du PS.
En vrac:
Une économie indélocalisable.
J'entendais quelqu'un dire l'autre jour : "même si vous n'aimez pas la mondialisation, la mondialisation est là". Dans ses dix questions, Ségolène Royal demandait :
Les peuples du Nord doivent être protégés de la concurrence internationale sans que les peuples du Sud ne soient victimes du protectionnisme. Avec quelles nouvelles règles ?
Plusieurs des participants ont répondu pour souligner la contradiction inhérente dans la formulation de la question. Par exemple :
Il n'est tout simplement pas possible de se protéger sans pénaliser les pays du Sud. C'est mathématique. Et chercher à résoudre cette quadrature du cercle, c'est surtout chercher à justifier l'injustifiable.
Jusqu'à présent, la ligne économique de Nicolas Sarkozy a été dans l'ensemble étatiste et protectioniste, patriotisme économique oblige. Comme si la seule réponse possible à la mondialisation était de lutter contre ces pays rivaux où l'on peut payer des ouvriers deux ou trois dollars par jour sans proposer la moindre forme de protection sociale.
Or, certaines industries, certains domaines ne peuvent pas être délocalisées ou ne peuvent pas être atteints par la concurrence internationale : le bâtiment, par exemple. Ca ne sert à rien de faire construire votre immeuble à bas prix au Bangladesh, si votre terrain est en France. Si l'agriculture intensive est susceptible de concurrence internationale, l'agriculture bio devrait beaucoup mieux résister, puisque la distance entre producteur et consommateur est un facteur plus décisif. De façon générale, les services vont mieux résister à ce type de concurrence, pour des raisons géographiques ou culturelles.
Historiquement, le PS, voulant défendre les intérêts des ouvriers, défend aussi un certain statut quo dans l'industrie. Il ne s'agit pas d'abandonner la défense de ces intérêts, mais de réfléchir à infléchir le développement de l'économie pour justement accentuer, renforcer ses aspects locaux.
Artisans et microentreprises
L'accent mis historiquement par le PS sur les salariés a peut-être laissé à la droite tout un "peuple" de travailleurs économiquement dominés, souvent vivant des situations extrêmement précaires, mais qui ont tendance à se reconnaître davantage dans la droite. Pourtant ce ne sont guère des "patrons".
L'idée d'une sorte de Small business act à la française était l'une des plus fortes de la campagne, mais il faudrait trouver le moyen (je ne suis que sympathisant, là) d'intégrer les intérêts de ces catégories dans un programme de gauche.
Redistribution
Ce matin, sur Sarkofrance :
L'inspection rappelle d'abord que l'impôt sur le revenu représente une part de plus en plus faible des recettes fiscales 6,5% des prélèvements obligatoires en 2008, soit 60 milliards d'euros de recettes. Pire, cet impôt ne respecte pas toujours le principe de progressivité, à cause des niches fiscales. En 2008, il existe 200 dispositifs dérogatoires à l'IR (abattements, exonérations, déductions, réductions et crédit d'impôts) pour un montant de 39 milliards d'euros.
L'impôt sur le revenu, en 2006, représentait 17,2% des impôts perçus par l'Etat, tandis que la TVA représentait 48,9% (source). Et Sarkozy et Cie rêvent (ou rêvait, en tout cas, du temps où il était encore le président du pouvoir d'achat) d'augmenter la TVA encore plus. Pour le social. S'il y a une taxe responsable de la "vie chère", du manque de pouvoir d'achat, et qui frappe les plus modestes, c'est bien la TVA. Dans des pays beaucoup moins "sociaux" que la France, la part de l'impôt sur le revenu est beaucoup plus importante : 29,8% en Grande-Bretagne, 37,7% aux Etats-Unis (en 2004).
Faire de l'impôt sur le revenu un mécanisme de redistribution, contre la TVA, me semble logique, et très clairement à gauche.
Dans le même ordre d'idées (mais là c'est beaucoup plus compliqué, j'imagine), c'est-à-dire un ordre d'idées très clairement socdem, il faudrait peut-être aussi réintroduire la redistribution dans le fonctionnement de l'Etat providence. Je pense, par exemple, à l'assurance chômage et aux retraites : diminuer les allocations des chômeurs et retraités riches, pour augmenter celles des plus modestes. Ou une autre formule semblable dans la même optique : faire de la protection sociale un instrument de redistribution.
Bon, je suis à peu près au bout de mes capacités de sympathisant. J'attends maintenant vos commentaires pour apprendre pourquoi tout ça ne marchera pas, n'est pas vraiment à gauche, a déjà échoué en Finlande, etc.
4 commentaires:
As-tu quelques précisions sur ce "small business act" dont tu parles ?
Augmenter la part de l'IR dans la fiscalité pour réduire la TVA me semble devoir être un des piliers d'un programme socialiste. Donc je te suis à 100% là-dessus.
Chômeurs et retraités "riches", j'imagine que c'est par rapport au patrimoine ?
Dans mon souvenir, dans les propositions (de SR, mais aussi de Bayrou je crois) qui évoquaient le _small business act_, il s'agissait d'obliger l'Etat de favoriser les petites entreprises pour ses commandes quand c'était possible. Mais il faudrait que je cherche un peu pour avoir plus de précisions.
Quant aux chômeurs et retraités "riches", je pensais surtout aux salaires : quelqu'un qui gagnait 4.000 €/mois pourrait se contenter d'un plus petit pourcentage de son salaire quand il est licencié, que qqn qui gagnait le SMIC. Je suis loin d'être assez specialiste pour savoir concrètement comment il faudrait arriver à ça.
Never forget :
le SBA ne passe pas la barre de Bruxelles. Il faut arrêter de croire qu'on peut faire de la politique sérieuse au niveau français.
edgar,
Et si on étendait le SBA à toutes les PME européennes, pas seulement françaises?
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